vendredi 14 mai 2010

She & Him "Volume Two"

Voilà deux ans, She & Him avait ensoleillé notre été avec Volume One, premier album léger et enchanteur. She, c'est Zooey Deschanel, actrice américaine de seconde zone en passe de devenir chanteuse première catégorie. Him, c'est M.Ward, stakhanoviste folk qui, quand il ne signe pas de formidables albums solo (dernier en date : Hold Time, 2009) ou ne prend pas part au supergroupe Monsters Of Folk (avec Conor Oberst et Mike Mogis de Bright Eyes et Jim James de My Morning Jacket), joue les partenaires de luxe auprès de Miss Deschanel.

Prolongeant l'aventure commune, le duo signe un nouveau disque d'une élégance rare. Volume Two est une gourmandise pop délicieusement rétro où se succèdent titres lumineux (l'enjoué single "In The Sun", "Don"t Look Back" dont la mélodie semble tout droit sortie de Pet Sounds, "I'm Gonna Make It Better", "Home", "Over It Over Again") et bluettes à fendre le cœur (la splendide et surannée "Lingering Still", "Ridin' In My Car", "Me And You", "I Can Hear Music", ou encore "Brand New Shoes" dont le dépouillement jure avec les arrangements fournis du reste des titres). Le duo a le chic pour composer des scies que l'on chantonne en deux temps trois mouvements. Preuve que Volume Two - plus encore que son prédécesseur - est à ranger en bonne position au rayon des meilleurs albums pop du moment.

Comme par le passé, M.Ward reste en retrait, mais chacune de ses interventions reste un moment magique. Que ce soit un discret contre-chant (l'association de sa voix granuleuse et de celle, claire comme de l'eau de roche, de son acolyte fait des merveilles), un chorus de guitare aérien, une ligne de clavier ou un couplet en chant lead, il démontre un talent fou. Que dire de la qualité des compositions et du chant de Zooey Deschanel ? Elle est simplement remarquable. Les (très) bons morceaux ne manquent pas et la chanteuse éclabousse le disque de toute sa classe. Point final à cette parfaite pièce montée : les arrangements concoctés par M.Ward sont un modèle du genre (multiplication des contre-chants bourrés de réverb, parties de cordes soyeuses, guitares riches et variées, chant de Zooey Deschanel mis en avant).

Ce qui fait également de Volume Two une éclatante réussite, c'est que le duo ne cède jamais à la facilité. Résolument vintage et insouciant, ce second album est bien plus qu'un simple délire rétro. D'une qualité mélodique peu commune, Volume Two confirme l'agréable impression que le duo maîtrise son art. Inspirés et complémentaires, Deschanel et Ward signent un nouveau sans faute, confirmant ainsi tous les espoirs placés en eux.

Découvrez la playlist She & Him

lundi 10 mai 2010

Gush "Everybody's God"

Qui a découvert Gush en concert ne peut que se réjouir de les voir enfin sortir leur premier album. Vus à deux reprises sur les planches l'an dernier (à Rock En Seine et surtout lors d'une première partie magique pour -M- à La Cigale), la grande famille Gush (deux frères et deux cousins) y excelle malgré son jeune âge. S'échangeant leurs instruments, se relayant au micro, déployant une puissance pop et une énergie communicatives, ils offrent une des prestations les plus percutantes du moment. Il faut beaucoup de (mauvaise) volonté pour ne pas en ressortir avec une banane énorme.

Outre de forts jolis minois, les quatre Gush ont plus d'un atout dans leur manche. Premier, et non des moindres : ils font figure de bizarrerie dans le petit monde du rock français. Guitares acoustiques limées, percussions truculentes, chœurs surf-pop tantôt électrisants tantôt caressants : leur musique est un cocktail explosif aussi foutraque que jubilatoire, entre gospel rock et folk-pop. Surtout, ils possèdent ce qui fait défaut à nombre de groupes français : grain de folie et originalité. Ils osent sans retenue et avec une réussite insolente.

Convoquant Beach Boys, Beatles, Beck et Stevie Wonder pour une orgie sonore irrésistible, Everybody's God comporte tellement de tubes potentiels qu'on ne sait plus où donner du déhanché ("Let's Burn Again", "Dance On", "Back Home", "Vondelpark", "No Way", "You Really Got Style"). Comment ne pas fondre devant le charme suranné de "Jealousy" ou les splendides ballades "My Favourite Song" et "Into The Sun" ? Capable de faire pleurer dans les chaumières, Gush nous sert aussi des riffs tranchants à la Keith Richards ("No Way", "Back Home"). A l'écoute de "Killing My Mind", on ne serait pas vraiment étonné que leur chanson préférée des Beatles soit "Ob-La-Di, Ob-La-Da".

La recette Gush est simple : quatre musiciens polyvalents, quatre bons chanteurs, quatre compositeurs futés. Et une alchimie à rendre jaloux n'importe quel Strokes. McCartney peut dormir sur ses deux oreilles : on ressent un vrai amour de l'orchestration chez Gush. Pour ces quatre drôles, les harmonies vocales semblent même être une religion, une seconde nature. Le groupe n'en finit plus de gravir les échelons, et fort est à parier que ce n'est qu'un début. Concentré de générosité, de fraîcheur et de culot, surprenant son auditeur en permanence, Everybody's God force le respect. Gush s'impose comme un chef de file dès son premier essai, et a tout pour casser la baraque en 2010. En anglais, Gush signifie "jaillissement". On n'aurait pas trouvé nom de groupe plus approprié.

Découvrez la playlist Gush


Lire également la critique de l'album sur Froggy's Delight.

dimanche 9 mai 2010

Concerts à venir... Juin 2010

Hindi Zahra le 1er Juin au Bataclan
Syd Matters le 1er Juin à La Maroquinerie
Soma le 1er Juin à La Boule Noire
Owen Pallett le 1er Juin à La Grande Halle Charlie Parker (La Villette)
Kate Nash le 1er Juin à La Cigale
Verone le 2 Juin au Zèbre
The Willowz le 2 Juin au Bus Palladium
Two Door Cinema Club le 3 Juin à La Cigale
Pony Pony Run Run le 3 Juin au Bataclan
Lily Wood & The Prick le 3 Juin à La Maroquinerie
Beach House le 3 Juin au Trabendo
Pacovolume le 5 Juin au Théâtre de la Cité Internationale
Air le 6 Juin à la Salle Pleyel
Jay-Z le 6 Juin au Palais Omnisports de Paris Bercy
VV Brown le 7 Juin à l'Elysée-Montmartre
Jonsi le 7 Juin au Bataclan
Them Crooked Vultures le 8 Juin au Zénith
Richard Ashcroft le 8 Juin au Trabendo
Gush le 8 Juin à La Cigale
Cypress Hill le 9 Juin à La Cigale
Hugh Coltman le 9 Juin au Café de la Danse
Mustang + Jessie Evans le 10 Juin au Point Éphémère
Supergrass le 11 Juin à La Cigale
Muse les 11 et 12 Juin au Stade de France
The XX le 14 Juin à l'Olympia
Bettye Lavette le 14 Juin au New Morning
John Grant le 14 Juin au Nouveau Casino
Florence & The Machine le 16 Juin à l'Olympia
Charlotte Gainsbourg le 16 Juin à La Cigale
AC/DC le 18 Juin au Stade de France
Absynthe Minded le 18 Juin à La Maroquinerie
NTM le 19 Juin au Parc des Princes
Jack Johnson les 23 et 24 Juin au Zénith
Gov't Mule le 23 Juin au Bataclan
Norah Jones les 24 et 25 Juin à l'Olympia
Solidays du 25 au 27 Juin à l'Hippodrome de Longchamp
Green Day le 26 Juin au Parc des Princes
Aerosmith le 29 Juin au Palais Omnisports de Paris Bercy
Grizzly Bear le 29 Juin à l'Olympia
The Dead Weather le 30 Juin au Bataclan
Snoop Dogg le 30 Juin à l'Olympia

samedi 8 mai 2010

Louis-Ronan Choisy "Rivière De Plumes" et "B.O. Le Refuge"

Auteur d'une prestation remarquée dans Le Refuge de François Ozon, sorti début 2010 dans les salles, le chanteur Louis-Ronan Choisy n'en n'est pas à son premier essai musical puisque Rivières De Plume est son quatrième album. Sans doute celui qui fera décoller sa carrière.

Ce qui charme et fait la différence, c'est que Rivières De Plume est bel et bien un disque pop. Pas un énième et fatigant disque de chanson française à texte. Les perles que sont "Copenhague", "L'Homme De Cire" ou "Un Funambule" sont là pour en témoigner. Planant au-dessus de ses chansons avec candeur et élégance, Louis-Ronan Choisy séduit dès la première écoute. Malgré une tessiture limitée, il tire le meilleur de sa voix grave et suave (rappelant étrangement celle de Marc Lavoine). Son chant touchant et susurré , juste et délicat, colle parfaitement à la sensibilité de ses compositions. Sa diction Gainsbourienne et le spleen (proche de celui de Benjamin Biolay) qui s'en dégagent y sont assurément pour beaucoup.

Rivières De Plume affiche un son tout en basses rondes, guitares simples mais efficaces, arrangements sans esbroufe mais collant parfaitement aux morceaux (mention particulière pour "Un Funambule"). Louis-Ronan Choisy a l'intelligence de ne pas grossir le trait. Il ne fait que souligner la mélodie avec tact, par une ligne de basse, une partie de cordes ou un chorus de guitare.

Disque subtil et d'une grande douceur, abritant une musique délicate et romantique (on ne consacre pas une chanson à Caspar David Friedrich innocemment), Rivières De Plume nous réconcilie l'espace de 40 minutes avec la pop française. Louis-Ronan Choisy parvient à en faire un disque lumineux et aérien malgré un propos souvent sombre. On se retrouve comme suspendu à un fil, en apesanteur. Cerise sur le gâteau : la chanson "Le Refuge", ritournelle éthérée que l'on n'oublie pas de sitôt. Le disque contient en bonus la B.O. du film Le Refuge, composée d'instrumentaux poétiques (au piano pour la plupart), qui vient confirmer le goût de son auteur pour les belles mélodies .

Lire également la critique de l'album sur Froggy's Delight.

lundi 3 mai 2010

MGMT "Congratulations"

Célébrés voilà 2 ans par une génération entière suite à un premier album (Oracular Spectacular, 2007) frisant la perfection et porté par une poignée de tubes intemporels ("Kids", "Time To Pretend", "Electric Feel", "The Youth"), MGMT semblait paradoxalement mal en point ces derniers temps. Embarqués malgré eux dans une spirale médiatique incontrôlable, les américains y ont semble-t-il laissé quelques plumes. Pressentant le fort potentiel du groupe (à l'inverse de Klaxons, au hasard), on attendait avec crainte leur seconde livraison tant les nouvelles compositions jouées l'an dernier à Rock en Seine nous avaient laissés perplexe. Il faut dire que jusqu'à présent, MGMT peine à faire honneur à ses chansons en live.

Déjouant les pronostics pessimistes, le groupe de Brooklyn - le duo est devenu combo suite à l'interminable tournée d'Oracular Spectacular - signe avec Congratulations une odyssée spatiale pleine de surprises. Un disque fouillis, tintinnabulant, grouillant d'idées et dont on se délecte chaque jour un peu plus. Un album où MGMT s'ingénie à nous perdre dans un dédale de sonorités et de structures alambiquées. Les deux gamins ont grandi, et la pop psychédélique pleine d'innocence et de fraîcheur d'Oracular Spectacular s'est muée en un rock progressif plus complexe et moins accessible.

En effet : pas de "Kids" ou de "Time To Pretend" dans ce second opus des New Yorkais. Si risque il y avait, ce n'était pas celui du surplace tant les synapses du duo semblent en ébullition permanente. Il faut du culot pour pondre ce disque déboussolant et prendre à contre-pied ceux qui attendaient un "Oracular Spectacular" bis. MGMT passe là un message fort : "la musique, rien que la musique". Et pas n'importe laquelle : la plupart du temps passionnante ("It's Working", "Song For Dan Treacy", "Someone's Missing", "Flash Delirium", "Brian Eno"), même si elle connaît quelques coups de pompe, notamment dans la seconde partie du disque.

Le morceau de bravoure "Siberian Breaks", d'une complexité orchestrale remarquable, propose ainsi 12 minutes d'intensité inégale débutant par une splendide mélodie aux accents de Midlake, plongeant ensuite allègrement dans un rock progressif pas toujours captivant, puis une symphonie pastorale un peu lisse (avec un chorus à la flûte). "Lady Dada's Nightmare", instrumental sombre et kitsch, certes plutôt joli au début, devient ensuite pompeux et lourd.

Ces deux morceaux mis à part, il n'y a pas grand chose à reprocher aux lutins psychédéliques de MGMT. Le disque se clôt par la chanson-titre ("Congratuations"), belle ballade apaisée qui sonne comme le calme après la tempête. Sa simplicité est en totale contradiction avec la démesure des huit autres titres : juste une guitare, une mélodie et de discrets arrangements japonisants.

Bercé par un univers féérique évoquant le Pink Floyd de Syd Barrett, on a la tête dans les étoiles tout au long de ce Congratulations, disque délibérément ambitieux, déconcertant mais revigorant, qui redonne espoir à une époque où tous les disques rock ont tendance à se ressembler.

PS : Par respect pour la famille de l'artiste, nous ne ferons pas de commentaire sur la pochette du disque...

Lire également la critique de l'album sur Froggy's Delight
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dimanche 2 mai 2010

Hey Hey My My "A Sudden Change Of Mood"

"One voice and one guitar, we are ready for war, we are ready for war" : les paroles de "We Go" (premier titre de ce second album de Hey Hey My My) annoncent crânement la couleur. Si l'on ajoute la jaquette (la même que celle du premier disque, mais le crépuscule apaisant a laissé place à un univers tout feu tout flamme) et le titre du disque (A Sudden Change Of Mood), hautement explicites, on comprend aisément ce qui nous attend : au revoir les proprettes (mais superbes) folk songs du premier disque, place à l'électricité. Pas de révolution pour autant chez Hey Hey My My : les mélodies sont toujours là, ce n'est que l'enrobage qui fait sa mue. A en croire les membres du groupe, ce "changement d'humeur" est en fait un retour aux sources et ce second disque révèle leur véritable identité musicale.

On a d'autant plus tendance à les croire qu'après une première chanson en forme d'avertissement ("We Go"), c'est un riff massif qui nous cueille sur "Not Fun Anymore", avant de laisser la place à de guillerets accords de piano. Le titre, qui n'aurait pas dépareillé sur l'excellent Sumday (Grandaddy), souffle le chaud et le froid pendant quatre minutes de grande classe. Au détour de quelques titres jubilatoires ("Jazzol" et son refrain qu'on se surprend à chanter sous la douche, la vicieuse "Go To Hell" et sa guitare bizarroïde, la sautillante "The Next Bar"), Hey Hey My My offre un visage inconnu et, grande nouveauté, donnerait presque envie de danser !

"Hopeless Girls" renoue avec la fragilité du premier album, sans toutefois atteindre la beauté de "Your Eyes When We Kiss" ou "Poison". "Xmas Day", entraînante rengaine au charmant refrain, conclut parfaitement l'album (croit-on). En toute fin de disque, un délicieux morceau caché en forme de cerise sur le gâteau, folk song décalée et acidulée, venue d'une autre époque, vient mettre un point final au disque. Le reste des titres verse dans une pop sympathique mais manquant de caractère ("Meant To Last", "You Look All The Same") ou bien une power pop efficace mais plus quelconque ("Pool", "Groove Combat", "Oh Lord").

Avec le succès mérité de son très bon premier disque, Hey Hey My My a pris confiance et franchit avec réussite l'épreuve du second album malgré quelques ratés et des chansons parfois un ton en-dessous de ce qu'ils ont fait par le passé. La mélancolie du premier album s'est muée en un enthousiasme à toute épreuve sans que le groupe n'y perde son identité. A Sudden Change Of Mood s'écoute de bout en bout avec beaucoup de plaisir et prouve que l'engouement autour de leur premier album n'était pas un simple feu de paille : les français sont désormais prêts pour enflammer les salles de France et de Navarre.



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