Bien mis en jambes par notre parcours du combattant pré-festival (RER, métro plein à craquer, bus bondé, bouchons, chaleur), nous arrivons à Solidays gonflé à bloc et prêt à en découdre. Mieux vaut en effet être d'attaque avant d'affronter ces 3 jours de musique et de fête.
C'est accompagné des dernières notes du concert de Winston McAnuff que nous entamons cette 12ème édition. Le reggae cool du Jamaïcain, chargé de vibrations positives, s'avère parfait pour commencer en douceur le festival.
Mais cette quiétude est de courte durée : à peine le temps de souffler que l'on se prend de plein fouet le set rageur des Blood Red Shoes. Un gars, une fille. Mais pas de Jean Dujardin. Le duo furieusement sexy de Brighton - Laura-Mary Carter, la guitariste/chanteuse au sex-appeal fou rappelle Alison Mosshart (The Kills, The Dead Weather), la timidité en sus - fait voler en éclat l'ambiance bon enfant qui régnait jusqu'ici : la foule s'excite sous les coups de boutoirs des anglais. "Light It Up", "Don't Ask", "It Is Happening", "Count Me Out", "Keeping It Close" : les morceaux de Blood Red Shoes sont d'intenses salves électriques.
A voir les deux jeunes rockers évoluer, on se dit que le blondinet Steven Ansell (batterie et chant) a bien de la chance de voir son acolyte chanter tous les jours à ses côtés. Mais entre ses fûts qu'il martèle allègrement et ses cordes vocales qu'il maltraite également, le bougre n'a que peu de temps pour contempler le spectacle agréable qui se déroule sous ses (et nos) yeux. N'ayant pas eu d'autre choix que de délaisser les jeunes premiers de la pop française, les parisiens au regard Revolver - qui passent en même temps sous le Dôme -, on ressort rassasié de ce concert explosif.
Malgré un réel entrain et des chansons sympathiques, ce n'est pas exactement la même chose avec Olivia Ruiz. Il faut dire que la compagne de Mathias Malzieu (chanteur de Dionysos) nous parle de crêpes aux champignons et de poil sous les aisselles. N*E*R*D, au moins, ça cause de filles, surtout, et de sexe, beaucoup.
Ayant déjà assisté au show chaud bouillant de General Elektriks en mars dernier au Bataclan, on sait ce qui attend les festivaliers sous le dôme et on les envie. Pour notre part, saisissant l'occasion de voir enfin N*E*R*D sur scène, on se rue vers la scène Bagatelle pour y assister au numéro des américains. A côté de nous fuse un commentaire on ne peut plus pertinent : "N*E*R*D, c'est pas de la M*E*R*D" entend-on notre voisin dire le plus sérieusement du monde.
Il faut dire que depuis une décennie, Pharrell Williams (aucun lien avec Robbie) - que ce soit avec les Neptunes ou N*E*R*D - tient la dragée haute au ghota du hip-hop et du R&B mondial. Producteur génial, demandé de toutes parts (Snoop Dogg, Madonna, Kelis, Jay-Z, Britney Spears, Justin Timberlake, Gwen Stefani, Uffie, etc... - la liste est longue), il a montré avec N*E*R*D qu'il savait également écrire de bonnes chansons. Ne restait plus qu'à confirmer sur les planches.
C'est désormais chose faite : N*E*R*D signe en ce début de soirée un des shows les plus percutants du festival. Au sein d'une set-list faisant la part belle aux trois premiers albums du groupe (parmi lesquels sont jouées les irrésistibles "She Wants To Move" et "Everyone Nose") viennent se glisser quelques extraits du prochain album (Nothing) à paraître en septembre prochain.
Pharell est au four et au moulin et, pour tout dire, même si ses deux acolytes rappeurs ne déméritent pas, on ne voit que lui. Le groupe est malheureusement desservi par un son plus que limite. Les basses saturées et les batteries (N*E*R*D joue avec deux batteurs) couvrent le reste, tant et si bien que les titres sont parfois parfois difficilement audibles. On doute que les américains aient eu le temps de faire des balances vu l'empressement avec lequel il sont arrivés sur scène... quelques minutes après l'heure prévue. Petite faute de goût : ces danseuses aux positions lascives qui n'apportent rien au spectacle. Fort heureusement, M.Williams tient la barre et malgré ces petits désagréments, N*E*R*D épate.
On sait pourtant à quoi s'attendre avec Archive, mais on tente quand même le coup. Au cas où. Célébrés sur un malentendu comme les descendants de Pink Floyd suite à deux bons albums (You All Look The Same To Me, 2002 et Noise, 2004), une poignée de bons morceaux et surtout un chef d'œuvre (la chanson "Again"), Archive est devenu depuis une imposture. Au faîte de leur gloire, leurs performances scéniques étaient déjà pénibles. Depuis quelques années ils se sont surtout distingués par deux albums quelconques voire mauvais (Lights, 2006, Controlling Crowds, 2009). On ne retiendra de leur passage à Solidays que le vide de leurs compositions.
Si Craig Walker avait réussi à insuffler une âme au groupe, Archive est aujourd'hui complètement dépassé. Pour ne rien arranger, leur show lénifiant subit à mi-parcours une longue coupure de son qui n'a pourtant pas démotivé le public, réuni en masse devant la scène Paris pour voir les anglais.
Notre estomac nous rappelant à l'ordre, c'est vers les restos du monde que nos pieds nous emmènent pour ingurgiter un yassa au poulet (plat sénégalais) réconfortant. Une petite bière glanée en route et on est d'attaque pour le concert très attendu de Kasabian. Au risque de se répéter, on rappellera à quel point l'excellent West Ryder Pauper Lunatic Asylum (2009) a fait remonter dans notre estime un groupe que l'on se plaisait à railler auparavant. Le combo de Leicester s'est transformé en l'espace de quelques mois en un formidable groupe de stade.
Le concert de ce soir ne fait que confirmer ce que l'on avait déjà vu en février dernier à l'Olympia : servis par une set-list impressionnante piochant dans leurs trois albums, Kasabian est une machine hyper rodée capable de soulever les foules. S'ouvrant sur "Vlad The Impaler", leur concert n'accuse aucun temps mort, aucune faiblesse (jugez plutôt : "Fast Fuse", "Where Did All The Love Go ?", "Underdog", "Shoot The Runner", "Empire", "Julie & The Moth Man", "Fire", "Reason Is Treason"). Le seul bémol vient une nouvelle fois du son, qui ne rend pas grâce aux arrangements des morceaux. On attend à présent avec impatience la suite de l'aventure discographique des anglais.
Ayant raté les très bons Hocus Pocus (qui jouaient en même temps que Kasabian) et ne pouvant aller découvrir Féfé sur la scène Domino, on se dirige vers Wax Tailor pour écouter la transcription live de son hip-hop aérien. Le souvenir qu'on en avait se vérifie ce soir : malgré de très bons moments ("Seize The Day / Que Sera", "B-Boy On Wax", "Say Yes"), on préfère Wax Tailor en CD.
En dépit de l'apport de chanteurs / rappeurs qui se succèdent au micro, d'une flûte traversière et d'un violoncelle, la scène manque de vie, de mouvement. Incluant trop de morceaux down tempo - pourtant délicieusement interprétés par la charmante Charlotte Savary -, Wax Tailor ne parvient pas à nous garder en haleine jusqu'au bout. Si on apprécie toujours autant les bricolages électro hip-hop du DJ français sur ses albums, il ne semble pas encore taillé pour des scènes de cette envergure.
Les belges de Ghinzu sont, eux, rompus à ce genre d'exercice. En six ans et deux très bons disques (Blow, 2004, Mirror Mirror, 2009), ils se sont constitués une solide réputation dans l'Hexagone. Alternant douceur mélodique et agressivité électrique sur disque, la rumeur les dit habités d'une folie furieuse sur scène. Démarrant sur "Mother Allegra", complainte aux accents religieux, les bruxellois assument leur goût des contrastes : ils balancent dans la foulée "Mirror Mirror", dont le riff éléphantesque fait écho au Muse d'Absolution.
Sans que l'on ne comprenne trop pourquoi, le charme de leurs chansons n'opère pas vraiment sur scène. Ce n'est pourtant pas faute de se dépenser : le chanteur / clavier (John Stargasm), lunettes noires vissées sur le nez, fait le show. Régulièrement parcouru de spasmes, il arpente la scène, s'offrant en spectacle. Ses acolytes suivent le mouvement, jouant puissamment. Mais cela manque de subtilité et semble parfois trop calculé. Les quelques mots adressés par le chanteur à la foule entre deux morceaux donnent également l'impression que Ghinzu se prend un peu trop au sérieux. Malgré une version énergique de "Do You Read Me", ce concert nous laisse sur notre faim.
Pourtant annoncés par une vague hype, Crookers (de Berlin) peine à nous faire danser sous le Dôme. Le duo de DJ's italiens y parvient sur quelques remix bien sentis, mais déçoit dans l'ensemble. C'est également le cas de cette fin de nuit électro : ni Elisa Do Brasil ni Beat Torrent (à télécharger absolument) ne parviennent à insuffler la flamme sacrée aux festivaliers restés éveillés jusqu'au bout de la nuit. Frustré par cette première journée en demi-teinte, nous regagnons le camping pour y entendre ici et là des appels à l'apéro.
Lire également la chronique du festival sur Froggy's Delight.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire