Acculé par la chaleur étouffante, c'est contraint et forcé que l'on se décide à sortir de notre tente à midi passé. On découvre un soleil encore plus intense que la veille. La casquette est de mise pour ce dernier jour à Pukkelpop. Début de journée pas vraiment transcendant avec Surfer Blood au Marquee. La performance scénique des jeunes floridiens ne soutient pas la comparaison avec leur album (Astro Coast). Le jeu du batteur s'avère un poil léger, la voix déçoit, et on reste circonspect devant la façon maniérée de bouger du chanteur, tout en sursauts et gestes brusques.
Dans un registre beaucoup moins sophistiqué, les Gogol Bordello démontrent sans trembler qu'ils portent bien leur nom. A leur aise sur la grande scène, les New-Yorkais font penser à une Mano Negra des Balkans. Devant la scène, une mer de bras levés approuvent. Un peu plus tard dans l'après-midi, on se retrouve en terrain balisé avec Two Door Cinema Club (préférés à The Drums, qui jouent en même temps et dont la hype paraît moyennement justifiée). Leur album (Tourist History) ne renverse certes pas les montagnes, mais leur musique est suffisamment fraîche et enlevée pour provoquer notre enthousiasme. Il faut dire qu'autant sur disque qu'en live, les jeunes pousses nord-irlandaises jouent avec fougue. Ce ne sont certes pas des bêtes de scène et leur musique carrée est un rien formatée, mais ils ont de l'énergie rock à revendre. Alex Trimble - le chanteur rouquin - assure, le groupe est bien en place.
Leur concert est une succession de petites pépites dansantes : "I Can Talk", "Come Back Home", "What You Know", "Do You Want It All ?", "Undercover Martyn", "This Is The Life", "Something Good Can Work". Malgré des structures trop ressemblantes d'une chanson à l'autre - batterie qui mouline, basse gonflée, chorus de guitare aigu et obsédant, enchaînement couplet calme/pont/refrain accrocheur boosté par la grosse caisse et les basses appuyées -, les Two Door Cinema Club passent sans problème l'épreuve du live. Le titre où la formule est sans doute la plus aboutie reste "Undercover Martyn", modèle du genre. Malgré ces quelques défauts, on aime.
A partir de maintenant, plus de répit : tout s'enchaîne très vite en ces dernières heures du festival. Tout d'abord, The National, qui livre sur la grande scène une prestation honnête mais en-deçà de nos espérances. Peu aidés par la sono, ils n'arrivent pas véritablement à retranscrire l'émotion de leurs albums. Le groupe est un peu statique, le chanteur très attiré par son verre de vin - tout en restant très appliqué - et la voix plus en retrait que sur le disque. Quant aux cuivres, ils apportent une belle couleur aux chansons. Excepté "Mr. November", la set-list puise essentiellement dans High Violet et Boxer, les deux derniers albums en date. On apprécie quand même : un peu de mélodie bien rythmée et pas l'inverse, ça sort un peu de l'ordinaire de Pukkelpop.
Broken Bells, la sensation pop de l'année, monte sur la scène Marquee. Ce n'est certes pas une surprise de voir l'association James Mercer (chanteur de The Shins) / Danger Mouse (moitié de Gnarls Barkley et producteur auprès de Gorillaz, Beck, feu Sparklehorse, The Rapture, Martina Topley-Bird, The Black Keys, The Good, The Bad & The Queen) briller de mille feux sur leur premier disque. Mais on attendait une confirmation en live : on l'a eue. James Mercer, voix haute perchée, tient la baraque. Danger Mouse, comme à l'accoutumée, reste impassible derrière son clavier. Les chansons et leurs harmonies parfaitement ciselées parlent d'elles-même, pas besoin d'en faire des tonnes, et le duo (auquel se sont joints plusieurs musiciens pour la tournée) le sait parfaitement. Très bon concert. Ces deux là ne sont pas près de nous décevoir.
Tout le contraire des Queens Of The Stone Age, groupe que l'on adule pourtant depuis une décennie. On repense souvent avec émotion à leur passage fracassant à Rock en Seine en 2005. Après un titre d'ouverture permettant de vérifier que le batteur Joey Castillo dispose toujours d'une force de frappe atomique, Josh Homme et sa bande se lancent dans leur grand classique, "The Lost Art Of Keeping A Secret". La chanson est triturée dans tous les sens, on a parfois du mal à la reconnaître. Le son est énorme. Trop, même. Ce sera l'un des points sensibles de ce concert où les QOTSA - pourtant en très grande forme et clairement ravis d'être à nouveau réunis - passent nos tympans à la moulinette à coups de joutes guitaristiques d'une agressivité rarement entendue. Jouant sur du velours, le frontman rouquin donne le ton du concert : "Just keep dancin', that's all I'm asking". Ça tombe bien, on est venus pour ça, Josh !
Malheureusement, ça se gâte par la suite : "Sick, Sick, Sick" entame une parenthèse réservée à Era Vulgaris, dernier album des américains du désert (sorti il y a déjà trois ans), mais également le moins bon. On sort de notre torpeur : "Go With The Flow" puis "No One Knows" d'une violence incroyable, meilleurs moments du set. "The very first time we played in Europe was here, in Pukkelpop ! I was drunk. Still drunk !" : Mr. Homme amuse la galerie avant de repartir interpréter quelques titres d'Era Vulgaris, le pied rivé sur l'accélérateur. Son jeu de guitare semble s'être transformé depuis son escapade en compagnie des Dieux de l'Olympe, Dave Grohl et John Paul Jones. Plus complexe, plus torturé, moins pop. On était venus pour en prendre pour les oreilles, on n'est pas déçu. Mais une nouvelle fois, la set-list a tué notre enthousiasme dans l'œuf. Une constante agaçante à Pukkelpop cette année.
Si plein de bonne volonté qu'il soit, ce n'est pas Jónsi qui changera la donne. Depuis cinq ans, Sigur Rós a tourné le dos à leur magnifique lyrisme neurasthénique originel pour enfanter une pop scintillante moins estampillée Lexomil, mais surtout bien moins intéressante. Il en va de même du premier album solo de Jónsi (chanteur et leader des Islandais) qui, sans démériter, ne s'écoute que d'une oreille. Idem pour ce concert pourtant fort sympathique et enjoué. On voudrait juste savoir pourquoi Jónsi s'efforce de chanter comme une fille. C'était magnifique à l'époque d'Agaetis Byrjun. Mais là, ça devient un peu trop systématique.
C'est au duo belge de 2manydjs que revient l'honneur de clôturer ce festival, sur la grande scène. Leurs remix boostés à la testostérone sont d'une efficacité imparable. Les écrans géants affichent en parfaite synchronisation avec la musique les jaquettes des titres remixés - ce qui donne un aspect fort peu improvisé au show. On distingue "Money" de Pink Floyd, Roxy Music, "Kids" de MGMT, "You Shook Me All Night Long" d'AC/DC, "Standing In The Way Of Control" de Gossip, "Music Sounds Better With You" de Stardust, "The Magnificent Seven" des Clash, Prince, "If I Ever Feel Better" de Phoenix, "You Wanted A Hit" de LCD Soundsystem, Daft Punk, Justice, et pour finir "Love Will Tear Us Apart" de Joy Division repris en chœur par la foule. Les 2manydjs démontrent un savoir-faire écumé dans les plus grands festivals de Belgique et de Navarre. Un gigantesque jet de confettis clôt ce très bon DJ Set.
Le directeur du festival déboule sur la scène, raconte on ne sait quoi en flamand. On se doute que ce doit être en rapport avec l'anniversaire du festival vu que les écrans géants égrènent ensuite chronologiquement les 25 affiches Pukkelpop depuis 1985. S'en suit un beau feu d'artifice dans le ciel de Kiewit. Rideau. On prend une dernière fois le chemin du retour vers le camping, slalomant au milieu d'un océan de gobelets en plastique. Bilan du festival un peu mitigé : quelques bonnes découvertes (Two Door Cinema Club, Band Of Horses, Broken Bells, Fat Freddy's Drop, Villagers, Fanfarlo, Girls), des confirmations (Hot Chip, Blood Red Shoes, Black Rebel Motorcycle Club), mais surtout des déceptions (Queens Of The Stone Age, Eels, Placebo, The Flaming Lips).
Le rock règne en maître à Pukkelpop, imposant sa loi sur la plupart des scènes, même si un espace un peu à l'écart ainsi que trois scènes sont consacrés exclusivement à l'électro. Signe des temps ou manque de richesse et de diversité de la programmation : peu de choses réellement surprenantes ou enthousiasmantes à se mettre sous la dent pendant ces trois jours. Restent de bons concerts (et d'autres moins bons), un site sympathique, des stands de restauration/boisson au rapport qualité/prix proche du scandaleux, un camping qui, malgré les efforts des bénévoles, se transforme petit à petit en déchetterie géante, et des festivaliers belges à la bonhomie toujours aussi appréciable et dont le sens de la fête reste une valeur sûre.
On apprend de bien tristes nouvelles à notre retour en France. Le festival s'est trouvé doublement endeuillé lors de ces trois jours. Michael Been, ingénieur du son et surtout père de Robert Turner (de son vrai nom Robert Levon Been), bassiste et chanteur des Black Rebel Motorcycle Club, est mort d'une crise cardiaque dans les coulisses du festival. Quant à Charles Haddon, leader et chanteur d'Où Est Le Swimming Pool, il s'est suicidé vendredi après son concert à Pukkelpop. Il s'est jeté dans le vide après avoir escaladé un pylone du parking des artistes. Les deux groupes devaient se produire ce Week-End à Rock En Seine, le festival maudit. Si les BRMC ont annoncé qu'ils seraient tout de même présents au Domaine National de Saint-Cloud, on doute qu'Où Est Le Swimming Pool en fasse de même. C'est Martina Topley Bird qui les remplacera au pied levé à Rock en Seine.
Lire également la chronique du concert sur Froggy's Delight.
Leur concert est une succession de petites pépites dansantes : "I Can Talk", "Come Back Home", "What You Know", "Do You Want It All ?", "Undercover Martyn", "This Is The Life", "Something Good Can Work". Malgré des structures trop ressemblantes d'une chanson à l'autre - batterie qui mouline, basse gonflée, chorus de guitare aigu et obsédant, enchaînement couplet calme/pont/refrain accrocheur boosté par la grosse caisse et les basses appuyées -, les Two Door Cinema Club passent sans problème l'épreuve du live. Le titre où la formule est sans doute la plus aboutie reste "Undercover Martyn", modèle du genre. Malgré ces quelques défauts, on aime.
A partir de maintenant, plus de répit : tout s'enchaîne très vite en ces dernières heures du festival. Tout d'abord, The National, qui livre sur la grande scène une prestation honnête mais en-deçà de nos espérances. Peu aidés par la sono, ils n'arrivent pas véritablement à retranscrire l'émotion de leurs albums. Le groupe est un peu statique, le chanteur très attiré par son verre de vin - tout en restant très appliqué - et la voix plus en retrait que sur le disque. Quant aux cuivres, ils apportent une belle couleur aux chansons. Excepté "Mr. November", la set-list puise essentiellement dans High Violet et Boxer, les deux derniers albums en date. On apprécie quand même : un peu de mélodie bien rythmée et pas l'inverse, ça sort un peu de l'ordinaire de Pukkelpop.
Broken Bells, la sensation pop de l'année, monte sur la scène Marquee. Ce n'est certes pas une surprise de voir l'association James Mercer (chanteur de The Shins) / Danger Mouse (moitié de Gnarls Barkley et producteur auprès de Gorillaz, Beck, feu Sparklehorse, The Rapture, Martina Topley-Bird, The Black Keys, The Good, The Bad & The Queen) briller de mille feux sur leur premier disque. Mais on attendait une confirmation en live : on l'a eue. James Mercer, voix haute perchée, tient la baraque. Danger Mouse, comme à l'accoutumée, reste impassible derrière son clavier. Les chansons et leurs harmonies parfaitement ciselées parlent d'elles-même, pas besoin d'en faire des tonnes, et le duo (auquel se sont joints plusieurs musiciens pour la tournée) le sait parfaitement. Très bon concert. Ces deux là ne sont pas près de nous décevoir.
Tout le contraire des Queens Of The Stone Age, groupe que l'on adule pourtant depuis une décennie. On repense souvent avec émotion à leur passage fracassant à Rock en Seine en 2005. Après un titre d'ouverture permettant de vérifier que le batteur Joey Castillo dispose toujours d'une force de frappe atomique, Josh Homme et sa bande se lancent dans leur grand classique, "The Lost Art Of Keeping A Secret". La chanson est triturée dans tous les sens, on a parfois du mal à la reconnaître. Le son est énorme. Trop, même. Ce sera l'un des points sensibles de ce concert où les QOTSA - pourtant en très grande forme et clairement ravis d'être à nouveau réunis - passent nos tympans à la moulinette à coups de joutes guitaristiques d'une agressivité rarement entendue. Jouant sur du velours, le frontman rouquin donne le ton du concert : "Just keep dancin', that's all I'm asking". Ça tombe bien, on est venus pour ça, Josh !
Malheureusement, ça se gâte par la suite : "Sick, Sick, Sick" entame une parenthèse réservée à Era Vulgaris, dernier album des américains du désert (sorti il y a déjà trois ans), mais également le moins bon. On sort de notre torpeur : "Go With The Flow" puis "No One Knows" d'une violence incroyable, meilleurs moments du set. "The very first time we played in Europe was here, in Pukkelpop ! I was drunk. Still drunk !" : Mr. Homme amuse la galerie avant de repartir interpréter quelques titres d'Era Vulgaris, le pied rivé sur l'accélérateur. Son jeu de guitare semble s'être transformé depuis son escapade en compagnie des Dieux de l'Olympe, Dave Grohl et John Paul Jones. Plus complexe, plus torturé, moins pop. On était venus pour en prendre pour les oreilles, on n'est pas déçu. Mais une nouvelle fois, la set-list a tué notre enthousiasme dans l'œuf. Une constante agaçante à Pukkelpop cette année.
Si plein de bonne volonté qu'il soit, ce n'est pas Jónsi qui changera la donne. Depuis cinq ans, Sigur Rós a tourné le dos à leur magnifique lyrisme neurasthénique originel pour enfanter une pop scintillante moins estampillée Lexomil, mais surtout bien moins intéressante. Il en va de même du premier album solo de Jónsi (chanteur et leader des Islandais) qui, sans démériter, ne s'écoute que d'une oreille. Idem pour ce concert pourtant fort sympathique et enjoué. On voudrait juste savoir pourquoi Jónsi s'efforce de chanter comme une fille. C'était magnifique à l'époque d'Agaetis Byrjun. Mais là, ça devient un peu trop systématique.
C'est au duo belge de 2manydjs que revient l'honneur de clôturer ce festival, sur la grande scène. Leurs remix boostés à la testostérone sont d'une efficacité imparable. Les écrans géants affichent en parfaite synchronisation avec la musique les jaquettes des titres remixés - ce qui donne un aspect fort peu improvisé au show. On distingue "Money" de Pink Floyd, Roxy Music, "Kids" de MGMT, "You Shook Me All Night Long" d'AC/DC, "Standing In The Way Of Control" de Gossip, "Music Sounds Better With You" de Stardust, "The Magnificent Seven" des Clash, Prince, "If I Ever Feel Better" de Phoenix, "You Wanted A Hit" de LCD Soundsystem, Daft Punk, Justice, et pour finir "Love Will Tear Us Apart" de Joy Division repris en chœur par la foule. Les 2manydjs démontrent un savoir-faire écumé dans les plus grands festivals de Belgique et de Navarre. Un gigantesque jet de confettis clôt ce très bon DJ Set.
Le directeur du festival déboule sur la scène, raconte on ne sait quoi en flamand. On se doute que ce doit être en rapport avec l'anniversaire du festival vu que les écrans géants égrènent ensuite chronologiquement les 25 affiches Pukkelpop depuis 1985. S'en suit un beau feu d'artifice dans le ciel de Kiewit. Rideau. On prend une dernière fois le chemin du retour vers le camping, slalomant au milieu d'un océan de gobelets en plastique. Bilan du festival un peu mitigé : quelques bonnes découvertes (Two Door Cinema Club, Band Of Horses, Broken Bells, Fat Freddy's Drop, Villagers, Fanfarlo, Girls), des confirmations (Hot Chip, Blood Red Shoes, Black Rebel Motorcycle Club), mais surtout des déceptions (Queens Of The Stone Age, Eels, Placebo, The Flaming Lips).
Le rock règne en maître à Pukkelpop, imposant sa loi sur la plupart des scènes, même si un espace un peu à l'écart ainsi que trois scènes sont consacrés exclusivement à l'électro. Signe des temps ou manque de richesse et de diversité de la programmation : peu de choses réellement surprenantes ou enthousiasmantes à se mettre sous la dent pendant ces trois jours. Restent de bons concerts (et d'autres moins bons), un site sympathique, des stands de restauration/boisson au rapport qualité/prix proche du scandaleux, un camping qui, malgré les efforts des bénévoles, se transforme petit à petit en déchetterie géante, et des festivaliers belges à la bonhomie toujours aussi appréciable et dont le sens de la fête reste une valeur sûre.
On apprend de bien tristes nouvelles à notre retour en France. Le festival s'est trouvé doublement endeuillé lors de ces trois jours. Michael Been, ingénieur du son et surtout père de Robert Turner (de son vrai nom Robert Levon Been), bassiste et chanteur des Black Rebel Motorcycle Club, est mort d'une crise cardiaque dans les coulisses du festival. Quant à Charles Haddon, leader et chanteur d'Où Est Le Swimming Pool, il s'est suicidé vendredi après son concert à Pukkelpop. Il s'est jeté dans le vide après avoir escaladé un pylone du parking des artistes. Les deux groupes devaient se produire ce Week-End à Rock En Seine, le festival maudit. Si les BRMC ont annoncé qu'ils seraient tout de même présents au Domaine National de Saint-Cloud, on doute qu'Où Est Le Swimming Pool en fasse de même. C'est Martina Topley Bird qui les remplacera au pied levé à Rock en Seine.
Lire également la chronique du concert sur Froggy's Delight.
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