vendredi 10 décembre 2010

Janelle Monáe (La Cigale, 9 Décembre 2010)

Se répandant comme une traînée de poudre, un énorme buzz annonçait au printemps dernier l'arrivée sur terre (et dans nos mp3) d'un album-concept R&B excitant à tous points de vue et produit par Outkast (l'un allant souvent avec l'autre). Le nom de la coupable ? Janelle Monáe, petit bout de femme scandaleusement douée et sexy.

L'info a depuis fait trois fois le tour du monde et The ArchAndroid, jubilatoire et fantaisiste shaker R&B/Pop/Soul/Funk, a fait tourner la tête de bien des auditeurs aux quatre coins de la planète. Album ambitieux, à la fois space opéra futuriste et hommage rétro parfois à la limite du kitch, The ArchAndroid écrase la concurrence. Janelle dame le pion à Santigold ou M.I.A et relègue bien loin le pourtant sympathique album de VV Brown.

C'est peu de dire que l'on est curieux de voir ce dont est capable la demoiselle en live, qui plus est à la Cigale. En première partie, le rappeur/slameur/poète Saul Williams assure devant une assemblée concernée. Claquements de doigts samplés, trombone, beats électroniques (sortis d'un instrument venu d'un autre monde) et surtout chant scandé, aux frontières du slam, de la soul et du rap : Saul Williams déploie ses talents d'explorateur hip-hop. On sent le trio pas vraiment au point, mais le magnétisme de la voix et le charisme du monsieur compensent.

Après un rapide changement de plateau, les lumières s'éteignent. Dès les premières secondes du show, où un monsieur loyal moustachu vient présenter le show et tester la réactivité de la foule, on se doute que l'on ne va pas assister à un concert comme les autres. Les musiciens sortent des coulisses un par un, tous vêtus de costumes noirs et blancs façon music hall. Janelle apparaît sur l'écran géant en fond de scène, la couronne dorée de The ArchAndroid sur la tête.

Trois formes capées de noir viennent se déhancher devant la batterie. Laquelle est Janelle ? On l'entend chanter sans savoir où elle est. La cape tombe à gauche, révélant miss Monáe, son joli minois et son improbable coiffure en banane. Comme sur disque, "Dance Or Die", "Faster" et "Locked Inside" se succèdent dans un délire funky frénétique. Le groupe est à bloc, mais la voix de l'américaine sous-mixée. Tout s'arrange dès "Locked Inside", splendide scie soul où l'on perçoit des échos de Michael Jackson. Tout sauf un hasard.

Souriante, enthousiaste et pétulante, Janelle est parfaite dans une mise en scène façon comédie musicale. Après un intermède où le mystérieux guitariste caché derrière ses postiches - resté seul sur scène - aligne les arpèges de fort belle façon, Janelle le rejoint et entonne "Smile". Cette belle ballade (reprise du thème des Temps Modernes écrite par Charlie Chaplin) présente sur Metropolis : The Chase Suite (premier EP sorti en 2007) met parfaitement en valeur le splendide écrin vocal de la chanteuse.

Sur "Wondaland", on se croit en effet chez "Janelle au pays des merveilles". Clochettes, accords majeurs, rythmique et phrasé sautillants, paroles éloquentes ("Take me back to Wondaland, I gotta get back to Wondaland"). Le tout assorti d'un étrange happening artistique où la chanteuse s'amuse à peindre une toile tout en chantant.

Le tempo retombe sur "Mushrooms & Roses", ballade lancinante et presque psychédélique, puis "Oh, Maker", adorable complainte R&B. C'est très bien, mais on attend que les choses s'accélèrent. On va être servi : un feu d'artifice nous attend lors de l'ultime ligne droite.

"Cold War" et "Tightrope", tubes immédiats et irrésistibles machines à danser, sont servis l'un après l'autre. Rien que ça. Janelle est fantastique, son groupe assure pied au plancher. La coiffure de la chanteuse vole en éclats, annonçant un final complètement rock & roll. Pour le rappel, l'américaine nous sert un "Come Alive" énorme de sauvagerie. Le groupe est déchaîné, Janelle a le feu sacré. L'américaine rugit dans son micro puis descend dans la fosse et... slame (oui, vous avez bien lu). On manque d'ailleurs de lui toucher la main d'un souffle. On est définitivement sous le charme.

Plusieurs minutes après que les lumières se soient rallumées, et alors que les spectateurs ont encore des étoiles dans les yeux, le batteur et le trompettiste viennent signer leur setlist pour le public. Puis le groupe revient au complet pour un dernier au revoir. Janelle irradie. On retiendra de ce concert fini en trombe une chanteuse gracieuse et généreuse, bien loin de l'image d'une diva soul. Mais surtout, on se souviendra de cette voix à se pâmer. Sens du show, physique, look, chansons : Janelle a tout pour devenir l'impératrice du R&B dans les années à venir.

Setlist Janelle Monáe : Intro Suite II Overture, 01 Dance Or Die, 02 Faster, 03 Locked Inside, 04 Smile, 05 Sincerley, Jane, 06 Wondaland, 07 Mushrooms & Roses, 08 Oh, Maker, 09 Cold War, 10 Tightrope / Rappel / 11 Come Alive (War Of The Roses)

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