Bonjour, pour commencer pourriez-vous nous raconter en quelques mots comment vous vous êtes rencontrés et comment le groupe s’est formé ?
Ambroise : Alors, Christophe et moi, on s’est rencontrés au collège, et on a commencé à faire de la guitare ensemble au lycée. Christophe m’a appris à jouer de la guitare, je lui ai appris à chanter, ça s’est un peu fait comme ça. Très vite, on s’est mis à faire de la musique et à composer ensemble. Jérémie et moi, par contre, on s’est rencontré beaucoup plus jeunes, à 6 ans, à la Maîtrise de Notre-Dame de Paris. C’est une école de musique assez intensive, surtout quand on a 6 ans (cours le matin, musique l’après-midi). Puis on s’est perdu de vue, moi j’ai arrêté à 8 ans parce que mes parents ne voulaient pas que je continue la musique et lui, a poursuivi tout ce temps là. Quand on a commencé à faire de la musique avec Christophe, c’est là que j’ai eu envie de tout reprendre, de recommencer la musique, de retourner à la Maîtrise de Notre-Dame de Paris, et c’est là-bas que j’ai retrouvé Jérémie. Le groupe ne s’est pas formé automatiquement, ça fait deux ans maintenant qu’on a ce nom Revolver et qu’on joue tous les trois ensemble. Avant ça, avec Christophe, on a cherché pas mal de personnes pour nous accompagner, mais on était toujours tous les deux comme tronc solide du groupe, et ça ne s’est pas fait tout de suite avec Jérémie.
Vous aviez dès le départ une idée précise de la formation que vous vouliez pour le groupe ?
Ambroise : Pas vraiment, en fait c’est au moment de faire notre première maquette, on nous avait conseillé de créer un Myspace comme on avait un groupe, alors on en a créé un, mais dessus il n’y avait que des photos alors on s’est dit que ça serait bien qu’il y ait de la musique aussi ! Donc on a acheté un peu de matériel pour enregistrer, pas grand-chose, on a commencé à enregistrer nos compositions et en fait, assez vite on s’est rendu compte qu’à deux on se trouvait limité, et c’est à ce moment-là que j’ai demandé à Jérémie de nous rejoindre. Je me souviens que j’avais longtemps fantasmé sur le rôle du violoncelle dans un groupe, je me disais que cela pouvait faire la basse en même temps, des secondes voix, des contre-chants… Et le fait que Jérémie soit un vrai musicien et qu’il chantait bien également, ça m’attirait. Et du coup, dès qu’il est arrivé, il y a eu un truc évident qui s’est passé.
Christophe : On a trouvé un son qui nous plaisait vraiment, dans l’équilibre guitare/violoncelle/voix.
Pour ma part, je vous ai découvert un peu par hasard en juillet dernier, en première partie de Patrick Watson aux Bouffes du Nord. J’ai beaucoup aimé votre concert qui était une heureuse découverte, un vrai coup de cœur. Quel a été votre parcours depuis lors (quasiment un an) ?
Christophe : L’enregistrement de l’album, bien sûr, mais auparavant nous avons fait beaucoup de concerts, notamment à la rentrée.
Jérémie : On a aussi beaucoup évolué dans la façon de jouer nos chansons.
Ambroise : A cette époque là (NDLR : en juillet dernier), on voulait faire l’album tout seul et peu après on a rencontré Julien Delfaud, qui a finalement réalisé le disque, et là encore cela a été une rencontre assez évidente. Dès qu’on l’a vu, on s’est dit que c’était avec lui qu’on allait faire l’album.
Donc dans ce temps-là, il y a eu cette rencontre avec Julien Delfaud, et juste avant l’enregistrement de l’album, on a fait beaucoup de concerts, de premières parties dans toute la France. C’est là qu’on a posé les bases de l’album, c’est-à-dire quelque chose de plus rythmé que ce qu’on avait fait auparavant, une interprétation un peu plus vécue aussi, plus brute.
Ensuite, il y a eu l’arrivée de la batterie, qui s’est faite avec le début de l’album et grâce à la présence de Julien Delfaud, qui nous a orientés vers ça. Nous on hésitait, et cela a été le fruit d’une longue réflexion et d’un cheminement qui a énormément été influencé par le nombre de concerts que l’on a fait. En résumé, toutes ces expériences vécues depuis un an nous ont été extrêmement bénéfiques car elles nous ont permis de savoir exactement ce qu’on voulait faire sur l’album. Et depuis l’enregistrement, on a composé quelques nouvelles chansons.
Ambroise : On a envie de garder les voix au centre de la musique, c’est ce qu’on aime le plus : les harmonies, le respect des textes…
Jérémie : Dans l’album, il y a aussi une volonté de ne jamais en faire trop, qu’on entende toujours l’essentiel, la mélodie.
Christophe : Oui, on voulait rester assez directs, aller à l’essentiel. Et puis aussi qu’on puisse entendre précisément les arrangements. Dans l’album, tout est assez clair, il n’y a pas d’arrangements cachés.
Jérémie : C’est pour ça qu’on peut parler de "pop de chambre", parce que ça reste très petit effectif, ce n’est pas symphonique…
Ambroise : On avait cette volonté d’aller à l’essentiel depuis toujours, cette recherche de l’évidence, ce rejet du superflu. On a quelque chose à dire, et on a envie de le dire de la façon la plus directe possible.
Votre album est une vraie réussite, mais un peu à l’image de votre concert aux Bouffes du Nord, si on devait lui trouver un défaut, ce serait ce côté un peu trop maîtrisé, trop parfait. N’avez-vous pas parfois envie de sortir un peu de ce cadre et de sonner plus rock sur certaines chansons ?
Ambroise : Julien Delfaud nous a permis de lâcher un peu prise, de se laisser plus aller à des choses non maitrisées. On est très appliqués, c’est notre qualité et c’est aussi un défaut : parfois, on manque de laisser-aller dans certaines choses. On en a conscience et on essaie d’aller vers ça. C’est une progression, et je pense qu’on a évolué dans ce sens depuis notre premier EP sorti il y a un an, et j’espère qu’on va continuer dans ce chemin-là.
Christophe : Je ne prends pas la maîtrise comme une sorte de reproche…
Ambroise : Non, c’est vrai, mais je vois ce que tu veux dire : c’est vrai qu’on a un peu du mal à assumer des défauts ou des imperfections.
Jérémie : Mais ça vient aussi du fait qu’on est un peu minimaliste.
Ambroise : Il y a peu d’éléments qui salissent le truc, donc c’est vrai que ça reste tellement épuré que finalement ça sonne propre. Mais ça fait partie de notre identité.
"Music For A While" est donc votre premier album. Pour les jeunes groupes, c’est souvent un rêve d’adolescent qui se concrétise. Votre disque sort dans quelques semaines, quels sont vos sentiments alors que c’est sur le point de se réaliser pour vous ?
Ambroise : En fait, comme les choses se font très progressivement, petit à petit le rêve est repoussé. Mais quand on y repense, on réalise combien notre histoire est incroyable, c’est sûr. Le rêve adolescent est encore très présent en moi car c’était il n'y a pas si longtemps que j’ai eu le rêve d’arrêter mes études pour faire que de la musique.
Christophe : Maintenant, on va voir ce qu’il va donner cet album.
Ambroise : Et on a envie de le défendre, puis d’en refaire d’autres.
Christophe : C’est une quête sans fin. Ce n’est pas parce qu’on sort un album qu’on se sent satisfait, on a toujours l’envie et le stress d’écrire de nouveaux morceaux, et on pense déjà à ce qui va suivre. En fait, on n’est jamais extrêmement serein.
Ambroise : On est toujours un peu en remise en question, et c’est ce qui fait qu’on avance. Autour de nous, on a des gens qui nous poussent, qui ont de l’ambition pour nous et cela nous oblige à ne jamais nous reposer sur nos lauriers. C’est la meilleure attitude à avoir. "Don’t Take It For Granted" comme dirait Bob Dylan.
Christophe : Tu imagines qu’il dit ça à 60 ans, "ne rien prendre pour acquis"…
Ambroise : Mais lui, il peut.
Oui, il sait de quoi il parle je pense…
Christophe : C’est le type qui a écrit le plus de chansons au monde…
Ambroise : Depuis Charles Trénet ! (rires)
Christophe : C’est juste fou, il écrit tellement et il continue à dire ça !
C’est un bel exemple…
Ambroise : C’est un modèle, c’est clair. Même si son dernier album est décevant. Mais l’avant-dernier était très bon. On est tous fans du Dylan des années 2000, mais là le dernier je le trouve moins bien.
Neil Young aussi a sorti un nouvel album cette année dont l’accueil a été moins chaleureux.
Ambroise : Je ne l’ai pas écouté. Mais Neil Young, j’ai l’impression qu’il est nostalgique de ses jeunes années et qu’il essaie de refaire ce genre de folk alors que Dylan, lui, est à des milliards d’années lumière de ses premiers albums. Il se réinvente sans cesse et c’est pour ça que je considère Dylan encore comme un artiste actuel. Neil Young, c’est plus un monument historique.
A l’écoute de Music For A While, on pense par moments à Cocoon, notamment sur "Luke, Mike and John". Leur premier album et la tournée qui a suivi ont connus un engouement étonnant. Ce succès sympathique semble être lié d’une part à la chanson "On My Way", qui a été en quelque sorte leur carte de visite, leur porte d’entrée, et d’autre part au fait qu’ils ont écumé sans cesse les salles de concert au cours de l’année. Pensez-vous que "Balulalow" ou "Luke, Mike and John" seront vos "cartes de visite"? Les avez-vous composées dans cet esprit ?
Ambroise : C’est marrant qu’on parle de "Luke, Mike and John" parce que pour moi, ce n’est pas une chanson évidente comme carte de visite. "Balulalow" un peu plus, déjà. On a eu beaucoup de mal à trouver un single pour cet album parce qu’on n’a pas du tout raisonné dans ce sens. Là où je trouve que c’est un bon album, c’est qu’il n’y a pas de déchet, toutes les chansons pourraient quasiment être défendues comme un single (il baisse la voix). Et ce n’était pas forcément le cas sur l’album de Cocoon (rires).
Ça sera répété…
Christophe : Et amplifié… (rires)
Mais c’est vrai que sur leur disque, plusieurs chansons sortaient du lot, le vôtre est plus homogène.
Ambroise : Oui, c’est vrai, mais ce que j’aime beaucoup dans leur succès, c’est que c’est venu très progressivement et c’est vraiment venu du fait qu’ils ont fait énormément de concerts.
Christophe : C’est vraiment sain comme succès, ce n’est pas un truc programmé qui a explosé d’un coup.
Avez-vous la même approche de la scène qu’eux, c’est-à-dire aller défendre votre album dans toute la France, aller au maximum au contact des gens pour leur faire découvrir votre musique ?
Revolver (en chœur) : Oh oui, absolument !
Jérémie : On veut aller vendre nos albums à la sortie de chaque concert !
Je suppose que tout ça va s’accélérer dans les semaines à venir ?
Ambroise : On espère, oui.
Christophe : Ce sera plutôt à la rentrée car cet été, on ne fait pas trop de festivals. J’espère qu’on pourra faire le maximum de concerts.
Ambroise : La scène, c’est un vrai défi pour nous, c’est quelque chose qu’on a envie de faire le mieux possible. Ça va être une vraie conquête : au même titre qu’on a essayé de faire un bon album, on va essayer de faire une belle tournée, la plus dense possible. On aimerait avoir le plus de dates rapprochées possible, partir sur la route, c’est un vrai fantasme.
Christophe : Et puis vendre ses albums à la fin des concerts, c’est là où tu peux conquérir chaque personne.
Ambroise : "Toi, tu seras fan, ma fille !" (rires)
Interview réalisée pour Froggy's Delight.
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