La soirée avait pourtant bien commencé, avec une sympathique première partie : Tom Brosseau, chanteur folk américain, se présente seul devant nous avec sa guitare, visiblement impressionné et pas très à l’aise. Avec son look de premier de la classe, il paraît tout fragile, et même si, physiquement, il a quelque chose de Bowie jeune, la comparaison s’arrête là. En effet, le jeune américain, contrairement à son homologue anglais, semble être doté d’un charisme d’endive. Fort heureusement, il possède une très belle voix, et ses chansons sont plus qu’honorables (notamment le très beau « Here Comes The Water Now »). Nous ne courrons pas acheter son nouvel album (« Posthumous Success »), mais son honnête première partie était une bonne introduction au concert tant attendu de PJ Harvey.
21h : précédée de son groupe et de John Parish, PJ Harvey arrive, mettant fin à l’insoutenable attente. Vêtue d’une robe noire, pied nue, cheveux noirs, bougeant de façon totalement désordonnée, sourire vissé aux lèvres derrière son micro, elle fait irrémédiablement penser à une petite fille (et ce malgré ses bientôt 40 ans). Le concert débute par « Black Hearted Love », chef d’œuvre de rage contenue ouvrant le dernier album. D’emblée, on est consterné par le manque d’envergure de l’interprétation livrée par le groupe ce soir : les guitares rugissantes et le chant puissant ont fait place à des six cordes sous anesthésie, bien trop sages, et à une voix à peine audible. On ne le savait pas encore, mais ce sentiment de déception allait se poursuivre tout au long de la soirée, et on ne se remettra jamais vraiment de cette impression de gâchis initial.
La faute à qui ? La faute à quoi ? Comme on le craignait avant le concert, la coupable est toute désignée : la set-list. C’est bien simple, les titres joués ce soir sont exclusivement tirés du dernier (et très inégal) « A Woman / A Man Walked By » et du dispensable « Dance Hall At Louse Point », précédent album écrit conjointement par John Parish et PJ Harvey en 1996. On a longtemps gardé l’espoir d’entendre ce soir des extraits de « Uh Huh Her » ou de « Stories From The City, Stories From The Sea », mais le suspense a rapidement tourné court, puisque juste avant d’attaquer la splendide « Leaving California », la fluette anglaise prend le temps de préciser que « ce soir, le groupe ne jouera que des titres composés par John Parish et (elle) ». Consternation immédiate… Il est vrai que l’affiche annonce « PJ Harvey & John Parish », et on se doutait bien que ce « A Woman / A Man Walked By » occuperait une place de choix ce soir, mais de là à jouer l’album dans sa totalité et à faire abstraction du reste de son impressionnante carrière et de 7 de ses 9 albums, il y a plus qu’un pas… Certes, on ne s’attendait pas à ce que PJ nous délivre un best of ce soir, mais on n’a clairement pas obtenu ce qu’on était venu chercher…
Nous éprouvons le plus profond respect pour cette artiste, et notamment pour son désir toujours plus ardent de toujours se renouveler. C’est la marque des grands, et peu d’artistes aujourd’hui en sont capables avec autant d’audace et de réussite qu’elle. Mais on avait déjà été à moitié convaincu par son dernier album qui, s’il contenait pas moins de cinq pépites (« Black Hearted Love » en tête, suivie de « Sixteen, Fifteen, Fourteen », « Leaving California », « The Soldiers », et « Passionless, Pointless »), comptait également trois chansons proprement insupportables (« April », « A Woman A Man Walked By », et surtout l’épouvantable « Pig Will Not »). Et force est de constater qu’il n’y a pas grand-chose à sauver de « Dance Hall At Louse Point », dont quatre extraits seront joués ce soir.
1h20 de concert, 15 titres, tout ça paraît qui plus est un peu court. Le public semble curieusement conquis, et on a la sensation bizarre qu’il était acquis d’avance. Il en réclame davantage, crie, siffle, tape dans ses mains tout ce qu’il peut. C’est vraiment une étrange expérience que de se retrouver en décalage complet avec la majorité d'une salle. Lorsque l’anglaise revient pour un rappel, des spectateurs lui réclament certains titres, mais celle-ci explique qu’ils ne les connaissent pas, qu’ils ne les ont pas répétés. Elle s’en sort avec une pirouette, avouant qu’ils n’ont « pas assez d’espace de mémoire » et ajoutant « quand tu auras mon âge tu comprendras… ». Le public en rigole, on ne peut s’empêcher de rire jaune.
Au final, il y aura eu quelques moments de grâce pure : « The Soldiers », magnifique titre accompagné d’un ukulele et de quelques notes de piano ; « Leaving California », sûrement la plus belle chanson du dernier album où la splendide voix de PJ Harvey est magnifiquement mise en valeur par le jeu de guitare sobre de John Parish ; « Sixteen, Fifteen, Fourteen » et son banjo rock & roll, et la très belle « Passionless, Pointless ». Pour le reste, rien que des expérimentations bruitistes touche-pipi – ou presque. On ne sera d’ailleurs pas loin du ridicule sur « A Woman A Man Walked By » et « Pig Will Not ». Le concert se terminera par « April », où la chanteuse gémit tellement qu’on a envie d’abréger ses souffrances, et les nôtres par la même occasion.
Une question reviendra sans cesse durant le concert : « Mais quand va-t-elle empoigner sa guitare, bon sang ? ». On espèrera en vain jusqu’à la dernière note sans succès. Ce n’est pas
Lire également la chronique du concert sur Froggy's Delight.
Pas trop d'accord avec cet avis (voir mes réponses en lien). C'était ton 1er concert de PJ Harvey peut-être ?
RépondreSupprimerIl est + difficile de rentrer dans l'album Dance Hall, au début il ne m'accrochait pas du tout. Tu devrais insister, il renferme pas mal de pépites.